Les artistes-auteurs sont des acteurs essentiels de la vie culturelle et intellectuelle de notre pays. Pourtant, ils n’ont pas les mêmes droits que les autres travailleurs. Pour mettre fin à cette injustice, j’ai déposé une proposition de loi qui vise à sécuriser leur parcours et leurs revenus.
La culture est un pilier de notre société. Elle nourrit nos esprits, relie les générations, dynamise nos territoires. Elle fait vivre nos villes et nos campagnes, crée des emplois, et porte la voix de la France au-delà de ses frontières. Mais aujourd’hui, la culture est en danger.
Le désengagement financier croissant de l’État laisse le monde culturel et artistique dans la précarité : -50 M€ sur le budget de la Culture en 2025. Nos communes, régions et départements, premiers financeurs publics de la culture, subissent eux aussi des coupes budgétaires sans précèdent : -2,2 Mds€ sur le budget des collectivités en 2025. À cela s’ajoute la remise en cause de dispositifs essentiels comme le Pass Culture.
Dans ce contexte, les artistes-auteurs, acteurs essentiels de la création, sont particulièrement touchés. Ils ne bénéficient toujours pas des droits sociaux fondamentaux dont disposent les autres travailleurs : pas d’assurance chômage, pas de couverture en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Et pourtant, sans eux, pas de livres, pas de films, pas de spectacles, pas d’œuvres visuelles, graphiques ou sonores. Leur travail est indispensable à la vie culturelle et intellectuelle de notre pays.
En 2020, le rapport Racine a également souligné les limites du système de rémunération des artistes-auteurs qui repose sur le versement de droits d’auteur au moment de la diffusion des œuvres. Ce mode de rémunération ne permet pas de valoriser tout le travail de recherche, de production et de promotion.
Le statut d’artiste auteur regroupe une trentaine de professions, tant dans les domaines des arts visuels et de l’édition que dans ceux du design, du numérique, de la photographie, de la musique, de l’audiovisuel et des arts de la scène. En 2024, ce ne sont pas moins de 456 000 personnes qui cotisent à ce régime.
Tous ces métiers sont marqués par une précarité structurelle et de fortes inégalités : 3,4% des artistes auteur·ices concentre 48% des revenus artistiques disponibles.
Face à cette situation, et en collaboration avec plusieurs organisations syndicales (SNAP-CGT, STAA-CNT-SO, La Buse, SRF…), j’ai déposé une proposition de loi visant à garantir la continuité de revenus des artistes-auteurs.
Le dispositif
Cette proposition de loi vise à créer un revenu de remplacement pour les artistes-auteurs entre deux phases de diffusion.
Calculée sur la base des derniers revenus déclarés, cette allocation serait proportionnelle et ouverte pour les artistes‐auteurs qui répondent à des conditions de durée minimale d’activité et de revenus antérieurs d’activité.
Le montant de l’allocation ne pourrait être inférieur à un plancher forfaitaire correspondant à 85% du SMIC.
La mise en œuvre serait confiée à l’UNEDIC et à France Travail.
Concrètement, l’artiste‐auteur ayant épuisé ses ressources liées au versement de précédents droits d’auteurs ou rémunérations accessoires liées à une activité d’artiste-auteur effectuera une déclaration auprès de France Travail, créant ainsi une « date anniversaire ». À cette date, il devra alors justifier d’un seuil minimum de revenus d’activité perçus sur les douze derniers mois défini par un seuil de professionnalité établi en heures SMIC. Dès que ce volume horaire dépasse ce seuil, ses droits sont ouverts, de la même façon que pour les salariés intermittents.
Nous proposons un accès suivant un paramètre glissant afin de prendre en compte la réalité de l’irrégularité des revenus artistiques d’une année sur l’autre. Ainsi, les artistes-auteurs accéderons au dispositif si ils justifient d’au moins 300h Smic sur 12 mois, 600h sur 24 mois ou 900h sur 36 mois.
Certains pays, comme la Belgique, ont mis en place un système similaire via le statut de “Travailleur des arts”.
Le financement
Le financement repose essentiellement sur les cotisations des diffuseurs, en sachant que les artistes-auteurs cotisent déjà pour l’assurance chômage via la CSG. Selon le rapport Racine, les diffuseurs d’œuvres versent des cotisations qui s’élèvent à 1,1% des droits versés à l’auteur, alors qu’un employeur cotise à hauteur de 27,74% du salaire brut versé au salarié. Nous défendons une hausse de la cotisation des diffuseurs à 5,15% des droits versés à l’auteur.
Ce nouveau taux de contribution resterait entre 8 et 9 fois inférieur au taux de cotisation patronal des employeurs du secteur privé, notamment ceux du spectacle vivant. Actuellement, le régime des artistes-auteurs est abondé à hauteur de 93% par les artistes-auteurs (402,5 millions) et seulement 7% par les diffuseurs (30,5 millions).
Cette proposition est économiquement soutenable pour les diffuseurs. D’ailleurs, de nombreuses structures, comme le réseau de diffiseurs PAC, soutiennent cette proposition de loi. Pour les structures dotées d’un budget annuel de 150 à 500 000 euros (centres d’art subventionnés par exemple), le coût est estimé à seulement 1000 à 2500 euros par an.
Ce dispositif serait auto-financé à environ 90% par les cotisations sociales et les économies réalisées sur le versement du Revenu de Solidarité Active.